L’abstention qui a profité aux symboles de l’ancien système..

En organisant les législatives du 12 juin 2021, le défi du président Tebboune est double. Le premier ,  c’est d’être allé à des législatives sans appuis partisans , sachant qu’il a coupé les ponts avec son parti le FLN alourdi par un passé récent catastrophique légué par Bouteflika.

Le deuxième défi c’est la rue, qui a relancé les manifestations du Hirak depuis le 22 février dernier, après un arrêt volontaire qui a duré une année dûe à la pandémie du covid 19.

Pour relever ces défis, le président Tebboune semble avoir adopté une démarche qui consiste à dépasser les clivages partisans en s’appuyant sur la société civile.

Cette démarche aurait pu aboutir sur un résultat probant si l’Algérie avait réellement une base d’organisations de la société civile qui pourrait jouer ce rôle. Pour pallier ce déficit on a assisté à une tentative de naissance forcée d’une nouvelle société civile avec la poussée de créations d’associations ces derniers mois.

Le discours politique était stigmatisé sur cette démarche comme seul moyen pour mettre en place dit-on la nouvelle Algérie avec un parlement majoritairement composé de nouvelles figures essentiellement jeunes aux bénéfices desquels on a même octroyé une aide de 300.000 dinars pour chaque jeune moins de 35 ans composant la liste soumise au vote.(L’enveloppe dépensée par l’Etat dans cette opération selon l’ANIE dépasse les 100 milliards de centimes.)

Les résultats annoncés par L’ANIE des législatives du 12 juin 2021 ont malheureusement démontré une réalité tout à fait inattendue.

D’abord sur le plan de la participation à ces élections, le taux s’est établi finalement sur le plus faible jamais connu auparavant dans ce genre d’élections,soit23,03%, et non à 30,20 % comme annoncé par l’organisation de Mohamed Charfi après, dit-on , un premier dépouillement.

En effet, sur 24.425.171 électeurs que compose le corps électoral dont 23.522.322 à l’intérieur du pays et 900.865 représentant la communauté nationale à l’étranger seuls 5.625.324 électeurs ont voté lors de ce scrutin. Sur les votants, ils étaient 5.583.082 à avoir voté à l’intérieur du pays contre 42.242 à l’étranger, soit un taux de 4,4%.

Sur le plan de la répartition des 407 sièges, les résultats sont venus aussi tout à fait inattendus. La répartition des sièges dans la nouvelle Assemblée populaire nationale, telle que communiquée par le président de l’ANIE Mohamed Charfi.  le FLN a pris 105 sièges, suivi des Indépendants 78, du RND 57, du MSP 64, du Front El Moustakbal 48, et du Mouvement El Binaa 40 sieges.

L’Hémicycle a été complété par des petits partis en emportant entre 1et 3 sièges.

Quelle lecture pouvons-nous faire de ce très faible taux de participation et de ces résultats ?

D’abord ce faible taux de participation qui s’est répété presque identique à celui du récent referendum sur la constitution (23,07%-23,03%) est le résultat de la très forte abstention populaire.

Ensuite, ce taux enregistré n’est pas un vote pour les programmes,mais plutôt dû à une mobilisation des partis structurés qui ont pu mobiliser leurs électorats traditionnels composés de militants et sympathisants fidèles, à l’image du FLN, du RND et les partis islamistes.

Pour le reste des partis qui ont réussi à avoir quelques sièges, c’est aussi grâce à la mobilisation de leurs militants et non à un vote pour leurs programmes.

En ce qui concerne la répartition des sièges, cela dénote un échec total de la démarche adoptée se basant sur la société civile. Seuls 78 sièges ont été obtenus par les listes indépendantes qui de surcroit, un bon nombre pourraient être issus de listes qui pour le moins que l’on puisse dire échappent à la démarche du président.

La situation étant ainsi, quelle marge de manœuvre pourrait avoir le président Tebboune dans cette nouvelle configuration politique ?

Il est évident que cette situation met le président devant un réel dilemme :s’il est soutenu par la probable majorité présidentielle qui a soutenu Bouteflika auparavant.

Cette majorité pourrait lui porter préjudice, car non seulement cela rappelle l’ère désastreux de l’ancien président déchu par le Hirak, mais en plus politiquement il n’a pas une main mise sur ces partis.

Ce dilemme devant lequel s’est trouvé le président Tebboune pourrait-il s’interpréter à son avantage ?

Oui, ce résultat pourrait s’interpréter à l’avantage du président Tebboune, car le peuple d’une manière générale et le Hirak en particulier qui n’a pas cru à la démarche du président pour instaurer une nouvelle Algérie et s’est trouvé finalement sans le vouloir devant une réalité amère : l’ancrage de plus belle de l’ancienne Algérie pour encore plus de temps.

Les abstentionnistes pourront comprendre aussi clairement que c’est leur attitude d’abstention massive qui a engendré cette situation. Ils pourront se rendre à l’évidence que le président a misé sur cette unique démarche comme seule moyen susceptible de déloger ces ténors qui ont mené le pays à la dérive,afin de rendre le pouvoir à une nouvelle génération capable de construire une nouvelle Algérie.

Contrairement à ce qu’on pense,  ce résultat pourrait éveiller les consciences et se mobiliser pour une Algérie nouvelle préconisée par le président Tebboune.

À bon entendeur…

Docteur Rafik Alloui

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