Cafouillage autour du gel du commerce avec l’Espagne : L’issue de secours de la Banque d’Algérie

Il a fallu un grave cafouillage dans la gestion pratique du gel des opérations commerciales avec l’Espagne pour qu’enfin la Banque d’Algérie intervienne dans le débat.

Politiquement, l’Algérie prend une décision historique en opposant à l’Espagne des restrictions commerciales , mais techniquement sur le terrain, les acteurs en charge de traduire ces décisions se perdent dans une inqualifiable défaillance . Douanes, banques et ABEF, bloquent devant un simple texte réglementaire.

Au final, C’est la Banque d’Algérie qui vient ce jour d’apporter un  éclairage , voire une issue de sortie de cet amalgame fait de fuites de responsabilités et probablement d’incompétence.

Bien entendu la banque mère s’impose la réserve de vigueur et ne fait en aucun cas référence à l’épisode espagnol. Pourtant au fond , c’est de cela qu’il s’agit.

Tout l’esprit de la nouvelle instruction signée ce jeudi par le nouveau gouverneur de la banque d’Algérie tourne autour d’un point clé de la problématique.

Voilà donc  une décision qui va soulager les importateurs spécialisés dans la revente en l’état et mettre fin au cafouillage observé dans la gestion des actes de domiciliation bancaire des opérations de commerce extérieur.

La banque d’Algérie, seule autorité monétaire officielle de la place vient d’émettre une instruction ce jeudi ( N 02 du 28.07.2022) qui abroge une autre instruction datée de 2017 ( la numéro 05 / 2017 du 22.10.2017) dont les dispositions avaient contraint les importateurs à l’obligation de procéder à la domiciliation de leurs opérations « au minimum 30 jours avant l’expédition des marchandises».

Cette instruction signée à l’époque , en 2017, par Mohamed Loukal ( ex gouverneur et ex ministre des finances) aujourd’hui en prison, obligeait également les importateurs à constituer auprès de leur banque, une provision qui ne saurait être inférieure à 120% de la valeur de la marchandise.

Autant de contraintes qui visaient essentiellement les importations des produits destinés à être revendus en l’état. Une situation dénoncée à l’époque en raison de son caractère jugé anti commercial , lourd pour les finances des opérateurs soumis à l’obligation de mobiliser les 120% de fonds en plus du délai d’attente d’un mois.

Toutes ces mesures sont officiellement abrogées à compter de ce jeudi, comme le précise l’instruction de ce jour qui relève dans ses dispositions la nécessité pour les banques commerciales d’assumer seules les risques en matière de domiciliation des opérations de commerce extérieur. Elle rappelle à la communauté bancaire «…les procédures et gestion internes en matière de domiciliation…et gestion des risques qui relèvent de la responsabilité des banques…».

Dans une autre disposition du même texte , la banque d’Algérie précise que « pour la domiciliation des opérations du commerce extérieur, il incombe aux banques d’évaluer les risques inhérents tenant compte de la qualité des contreparties commerciales».

En plus clair, la banque d’Algérie, responsabilise les banques commerciales et les interpelle quant au professionnalisme qu’elles doivent observer dans l’appréciation des risques et l’évaluation de leurs clients au chapitre du commerce extérieur.

Aujourd’hui ( 5 ans après ) la banque d’Algérie a décidé d’agir en mettant fin à cette incohérence.

Pourquoi justement aujourd’hui ? Qu’est ce qui a incité la banque des banques, à réagir et quel en a été le déclic ?

La réponse se trouve dans le lien à établir avec la dernière controverse née du gel des opérations commerciales avec l’Espagne.

Un dossier qui a curieusement été géré par l’ABEF ( association des banques et établissements financiers ) une entité qui n’a légalement aucune autorité sur le secteur . Statutairement elle ne peut ni réglementer ni donner des instructions aux banques de la place si ce n’est qu’elle a pour rôle de répercuter les directives et autres orientations pouvant émaner d’institutions officielles tels l’autorité monétaire ou les départements ministériels habilités.

Or au lendemain de la suspension du traité d’amitié et de bon voisinage avec L’Espagne, mesure politique décidée en toute souveraineté par les pouvoirs publics algériens, l’ABEF «instruisait» les banques commerciales de suspendre toutes les domiciliations de commerce extérieur avec l’Espagne. C’est à dire le 9 juin dernier. Sans autres précisions techniques ni mode opératoire.

S’en suivit alors un véritable cafouillage . Des operateurs algériens avaient leur marchandise déjà embarquée , d’autres étaient en pleine traversée et pour finir, des cas de marchandises provenant d’Espagne étaient déjà dans les ports Algériens.

Blocage total. La douane refusant d’assumer seule, ces cas, ne pouvait traiter ces dossiers quand bien même ces marchandises étaient arrivées avant la date d’interdiction. Les documents de voyage et d’arrivée,le prouvant.

Vers la troisième semaine de juillet l’Institution douanière interroge la même ABEF sur l’attitude à entreprendre. Faut il interdire des produits non espagnols provenant d’Espagne ou des produits espagnols provenant de pays autres que l’Espagne ?

L’Abef tente de dénouer cette situation en adressant une correspondance aux douanes en date du 23 juillet. Elle précise que les marchandises embarquées avant le 9 juin , ne sont pas concernées par la mesure. Et qu’à ce titre les documents de transport (connaissement et autres lettres de transports aériens) faisaient foi.

Ce qui était censé lever l’équivoque et permettre aux opérateurs de dédouaner leur marchandises.

Sauf que la réalité technique livrait un autre point de discorde.

Faut il tenir compte de la date d’embarquement de la marchandise ou plutôt de la date de domiciliation de l’importation laquelle devait être faite au minimum 30 jours avant l’expédition des biens et ce conformément à l’instruction de 2017 que la Banque d’Algérie a abrogée aujourd’hui?

Ce point concerne notamment les importateurs de produits destinés à la revente en l’état.

Il est curieux au final de relever l’incompréhensible attitude de l’ABEF et de la Banque d’Algérie dans ce dossier. Car il faut savoir que des opérateurs avaient engagé des payements via leurs banques et voyaient leurs marchandises interdites de sortie.

Une simple précision aurait permis d’eviter tous ces tracas et la perte de temps et d’argent . Pourquoi n’avoir pas tout simplement instruit les banques et informé les opérateurs qu’à compter de ce fameux 9  juin, aucune opération de domiciliation , ou d’ouverture de lettres de crédit ne serait acceptée?

A.A

 

 

 

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