Réévaluation du dinar et augmentation des salaires: L’odeur du gaz…

 

Abdelmadjid Tebboune s’est dit prêt à réévaluer le dinar , action qu’il inscrit au registre du renforcement du pouvoir d’achat.

Jusqu’où cela serait il possible et sur quels éléments objectifs pourrait il asseoir cette ambition ?

À la somme des mesures préconisées par le chef de l’Etat, après les dispositifs fiscaux et parafiscaux ,  destinés à renforcer le pouvoir d’achat, vient s’ajouter un probable  réajustement de la valeur du dinar.

L’annonce est en soi, un fait marquant , s’agissant d’une démarche monétaire susceptible d’agir sur l’ensemble des maillons intervenant dans la sphère économique. Et par prolongement , avec des retombées positives sur le porte-monnaie des ménages.

Si elle est socialement « juste» , cette action est par contre, «économiquement» risquée.

Annonçant sa décision de procéder à des augmentations de salaires et la revalorisation de l’allocation chômage , dans sa dernière sortie face aux médias, le président de la république a ainsi évoqué sur la lancée , le recours à une réévaluation du dinar.

Quand et comment ?

Le chef de l’État s’est voulu prudent , préférant attendre la collecte des données , vers la fin de l’année , notamment les chiffres liés aux recettes des exportations .

Tebboune ne s’engagera sur aucune date même s’il a fait allusion à une faisabilité devant intervenir début 2023 suivant un mécanisme de revalorisation salariale qui devrait obéir à un processus progressif, comme il a tenu à le souligner .

Les salaires étant universellement indexés sur le niveau de la productivité et conditionnés par les taux d’inflation , quelle serait donc la nature de ces données finales qu’attend le chef de l’État pour rendre effective l’augmentation promise ?

Tebboune s’est dit conscient qu’il est surtout indispensable d’agir sans pour autant provoquer des poussées inflationnistes. D’autant que l’inflation oscille justement entre 7, 2 et 9% ces deux dernières années. La flambée des prix au niveau mondial , ayant eu des répercussions directes sur les importations algériennes , notamment celles des produits de large consommation.

Quand il a parlé de la revalorisation des salaires, Tebboune a fait mention du renforcement du pouvoir d’achat en évoquant le recours à un réajustement à la hausse de la valeur du dinar .

La monnaie nationale a connu une dépréciation assez poussée durant 2021 notamment. En réalité, la dévaluation du dinar , a atteint les 18% entre juin 2019 avec un cours moyen de 1euro pour 134,1 dinars et janvier 2021 où un euro s’échangeait contre 160,9 dinars. Ce comparatif illustre la variation sur 1 an et demi.

Face à l’euro , une monnaie qui a sensiblement chuté ces derniers temps pour atteindre une égalité parfaite avec le dollar, il y a lieu de noter que le Dinar en a profité pour se stabiliser à un niveau beaucoup moins dramatique que celui de 2021.

la réévaluation inscrite dans les projets de Tebboune devra inéluctablement se baser sur l’étude des données qu’aura à entreprendre l’institut d’émission , la banque d’Algérie, seul organisme habilité et outillé pour fixer une parité répondant aux paramètres économiques du pays.

Réévaluer la monnaie nationale est surtout un processus techniquement complexe car reposant sur des indicateurs pas toujours faciles à maîtriser, notamment l’inflation et la dépendance aux importations ainsi que le poids des cours volatiles du pétrole sur la structure de nos recettes.

Aujourd’hui, il s’agit beaucoup plus de corriger un niveau de dévaluation qui a gravement fait glisser le dinar entraînant un coût important sur le pouvoir d’achat et absorbant également toutes augmentations des salaires.

Sauf que la réévaluation de la monnaie en règle générale s’inscrit en totale incompatibilité dans un contexte d’inflation où justement c’est l’inverse qui est préconisé , en l’occurrence , la dévaluation.

Ce qui va bien entendu, réduire la marge de manœuvre de Tebboune qui ne peut aller au delà des règles économiques.

Même si d’ores et déjà des prouesses sont annoncées sur les recettes attendues en devises et qui devraient atteindre quelques 52 milliards de dollars à la fin de l’année. Avec dans le lot un chiffre record escompté, celui des 7 milliards de dollars d’exportation hors hydrocarbures.

Tout semble indiquer , à la lumière des dernières données sur les 6 premiers de l’année que la balance commerciale du pays est partie pour afficher un excédent de pas moins de 11 milliards de dollars !

Est ce pour autant suffisant pour nourrir l’espoir d’une augmentation des salaires conséquente et économiquement méritée?

Le salaire étant le fruit d’une performance économique et non point celui d’un confort commercial, il sera difficile de l’indexer sur des chiffres volatiles offerts par une conjoncture énergétique particulièrement favorable .

Pari difficile tant que la dynamique économique n’a pas encore été amorcée pour rendre structurelle la croissance tant convoitée .

Le dinar à l’instar de toutes les monnaies devrait tirer sa véritable valeur d’une contrepartie réelle , faite de biens et services et d’un niveau de production appréciable. Tout comme le niveau des réserves de changes , elles mêmes dépendantes de la performance à l’exportation . Il ne serait économiquement possible de manipuler a la hausse la valeur du dinar que si les exportations hors hydrocarbures confirment leur tendance à s’inscrire dans la durée , en valeur et en volumes.

R.N

 

 

 

 

 

 

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