Ni le ramadhan ni ses longues journées ne les empêchent d’être à leurs postes : Ces jeûneurs pas comme les autres .

« Travaille pour que, quand tu seras grand, ton labeur travaillera pour toi ».

Ce proverbe nous rappelle à quel point le travail est capital. Car, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce ne sont pas tous les algériens qui partent en congé en pareille période du…Ramadhan.

Il est vrai que bon nombre d’administrations et services se vident de leurs employés, mais d’autres sont là à travailler durement afin de s’assurer «son pain ».

Une tournée  dimanche dernier, dans ,notamment les chantiers de la capitale, nous a permis d’en avoir le cœur net. Madjid est l’un de ceux-là.
Maçon de profession, rencontré sur un chantier de construction de logements pour le compte d’une entreprise étatique, sur les hauteurs d’Alger, il a d’emblée affirmé que sans sa « journée », ses enfants « ne pourront rien se mettre sous la dent».
« Je n’ai pas eu la chance d’exercer comme PDG ou député. Je suis maçon et je n’ai pas à m’apitoyer sur mon destin. J’exerce un métier noble me garantissant de subvenir aux besoins de ma famille. Pour moi, c’est le plus important », a-t-il témoigné.

Pour lui, qu’il pleuve ou qu’il neige, le bien être de ses trois enfants passe avant tout. « Je serais menteur si je vous dis qu’il est aisé de jeûner et de travailler, exposé au soleil durant ces journées caniculaires mais que faire?  Je n’ai guère le choix », a-t-il ajouté.

Avec toutes les dépenses durant mois de carême et un aïd sur les portes, pas question pour notre maçon de « s’offrir une seule journée de repos » en dehors du week-end.
« La vie est dure mais il faut faire avec. Ce n’est pas la canicule et/ou le jeûne qui vont me dissuader de garantir à mes enfants le minimum de bonheur », a-t-il confié comme pour résumer «le sacrifice » de ces « bâtisseurs ».

Madjid, pas trop bavard est vite rejoint pas son «ami » de toujours. Suspendu entre ciel et terre, Ami Belaïd est grutier. Sans trop vouloir s’attarder sur son « métier », il s’est juste contenté de rappeler que le travail, c’est le tout sans pour autant « nier » qu’il n’est vraiment pas facile de jeûner et de passer six heures de temps « à tourner autour de soi» du haut dans sa cabine.

« Dans notre métier, au-delà de jeûner, s’exposer au soleil, l’erreur n’est pas permise. Elle peut être fatale. Il faut être très attentif. Dans le cas contraire, les suites peuvent être désastreuses », a-t-il indiqué.

Zouafra : une autre histoire de détermination

Ils sont venus des quatre coins du pays et ont choisi la capitale à la recherche d’un travail qu’ils n’ont pas pu trouver chez eux. Chéraga, Bois Des Cars, Ouled Fayet, Bab Ezzouar et Aïn-Allah, pour ne citer que ces communes, constituent des lieux de prédilection où la présence de ces Algériens est des plus nombreuses.

A chacun sa spécialité et sa stratégie de négociation avec les employeurs. Ils attendent impatiemment, l’arrivée d’un éventuel entrepreneur dans les travaux de bâtiment ou le cas échéant, d’un particulier en quête de maçons, de peintres ou de plâtriers.
Ils ne sont pas trop nombreux en ce mois de carême, mais beaucoup d’entre eux, ne tiennent absolument pas à « rentrer les mains vides » l’aïd prochain.

Appelés communément zouafra, ces travailleurs tentent tant bien que mal de trouver des emplois pour une certaine période (un à deux mois) afin de se mettre à l’abri d’un éventuel blocage.
Leurs vêtements froissés et tachés de plâtre, de peinture ou de ciment, n’entament en rien leur fierté inébranlable.
« Vous êtes à la recherche de combien d’employés ? », s’est-interrogé l’un d’entre eux, nous voyant nous approcher du groupe. Pour notre part, on ne pouvait leur offrir « du boulot », l’objectif étant de « pénétrer » leur monde du moins pour quelques minutes.

«Si ce n’est pour du travail, je ne vois pas de quoi pourrait-on bavarder ensemble », nous a déclaré Younes rencontré aux Bois Des Cars, pas trop loin de l’Université de Delly Brahim.

Originaire de Sétif, plâtrier de profession, il a fait montre de sa « disponibilité » à accepter «n’importe quel tâche ».
Il s’est par ailleurs, dit (comme la plupart de ses amis) ne pas être gêné par les longues journées du ramadhan. « Il faut un peu de tout pour faire un monde. Dans le nôtre, il faut suer durant la journée pour dormir la conscience tranquille, la nuit. Tendre la main, n’est pas pour nous. Nul ne viendra débourser pour toi pendant l’année si tu ne le fais pas pour toi », a-t-il résumé la situation de Kamel, Boussaâd et tant d’autres. Et ce n’est pas fini.

Entre leur « devoir » religieux de jeûner et « le droit » à un bol de chorba, les zouafras affirment « que là tâche n’est pas facile ». Et c’est vers les restos du cœur, répartis à travers les quartiers de la capitale, qu’ils se ruent. Ces restos sont les seules espaces réellement nationaux où des Algériens, venus des quatre coins du pays, se partagent le même plat de… misère.

Entre les allers et retours…les couloirs

Nos mâcons et zouafras ne sont pas les seuls à ne pas se permettre « un congé » en ce mois de Ramadhan. Nos médecins et infirmiers aussi. Il était environ 14h quand nous entamons le portail principal du service des urgences médico-chirurgicales de l’hôpital Mustapha d’Alger. Tout indiquait que le service connait une ambiance particulière, comme à chaque jour d’ailleurs.

Les sirènes des ambulances, nous feront oublier qu’il s’agit d’une journée ramadhanesque. Les malades y affluaient de toutes parts. Le nombre du personnel médical ne semblait pas réduit. Mais ce n’est pas en se tenant à l’écart qu’on pouvait avoir le cœur net. Il fallait voir de tout prêt. Et comme il fallait s’y attendre, les salles d’attentes étaient bondées de monde. A chacun son mal. Avec la crise sanitaire due au coronavirus, rien n’est plus comme avant.
Il faudrait tout de même attendre son tour ».

« On ne peut pas vider les établissements de santé. Il faudrait bien qu’il y’ait du personnel à s’occuper des malades et des cas urgents », a souligné à propos le Dr Ahmed.
Médecin urgentiste, ce dernier a en outre assuré que « sur instruction de la tutelle –une information que nous n’avons pu ni confirmer ni infirmer- les congés de maladie ont été carrément interdits cette année». Évoquant son «emploi » du temps, le Dr Ahmed a noté qu’il est trop chargé.

« On se sent vraiment épuisé durant ces longues journées de jeûne et de chaleur mais, faudrait-il le souligner, notre mission est d’apporter assistance et soins à nos concitoyens.
Outres les médecins qui s’assurent de la continuité de la prise en charge médicales, d’autres, en uniforme, cette fois-ci, acquittent chacun, de sa mission : celle de veiller à la sécurité des personnes et des biens.

Ils sont gendarmes, soldats de l’ANP, gardes communaux et policiers.

Si ceux exerçant dans les administrations, ne s’exposent pas trop aux effets de l’équation jeûne-canicule, pour ceux en poste dans les différents postes de contrôle, la tâche n’est pas facile. Sous un soleil de plomb, des heures durant, ces Hommes méritent tous les hommages.

Y.O

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