Femmes divorcées : Un fardeau trop lourd à porter…

En ce 8 mars, journée internationale de la femme, devenue un rituel pour offrir une rose ou inviter à diner, il est judicieux d’évoquer les cas de ces milliers de femmes « dont le rêve de vivre en conjoint » est confronté à des réalités imposées parfois par une société algérienne ayant perdu tous ses repères.

Il est vrai que les causes du divorce sont multiples, mais le « statut » de ces « mariées divorcées » dont on ne parle que peu, représente en fait pour ces dernières,  un lourd fardeau à porter.

Les « chiffres importent » peu. La réalité est que les divorces sont, souvent, vécus comme un drame incommensurable par les Algériennes qui sont alors non seulement jetées dans la rue par l’ex-époux, mais aussi par leurs propres familles, la société n’acceptant pas les femmes divorcées et ayant souvent tendance à les accabler de tous les torts.

« C’est le calvaire au quotidien »  a témoigné Salima. Jeune, belle et intellectuelle, celle-ci n’a «jamais cru qu’au fait, le mariage constitue la fin d’un amour partagé pendant des années ».

A raison ou à tort, Salima mariée à un copain d’université ne s’est toujours pas remise d’une fin qu’elle a qualifiée tout bonnement de troublante après seulement deux ans de mariage.

« Il (Kamel son mari) m’avait tout promis alors qu’on sortait ensemble à l’université. Je me souviens qu’il m’avait promis l’amour éternel et j’avais tout le temps cru à ses belles paroles. Ce ne fut pas le cas hélas.  Deux ans de mariage m’auront suffit pour me rendre à l’évidence que nos chemins ne pourront jamais se croiser », a-t-elle témoigné non sans amertume.

Âgée aujourd’hui de 31 ans,  Salima peu bavarde s’agissant de sa vie privée, a bien voulu tout nous raconter dans le détail, et ce après insistance.

« Pendant notre première année de vie commune, tout allait pour le mieux.  On sortait, on chantait et on dansait. Mon ex-mari ne ratait aucune occasion pour m’offrir un cadeau. J’étais vraiment gâtée. Pour une raison que j’ignore jusqu’au jour d’aujourd’hui, il s’est complètement métamorphosé.   Je n’arrivais plus à le suivre ni encore moins à lui faire plaisir. J’ai été tout le temps refusée.  Vivre avec lui sous le même toit devenait de plus en plus un cauchemar.  Entre nous, c’était fini. Etrangement, c’est lui qui me signifia que le mieux pour nous deux, c’était de rompre le mariage et ainsi de divorcer. Chose que je ne pouvais refuser, car je savais que c’était l’ultime solution », s’est confiée notre interlocutrice.

Nous l’avions rencontrée en ce début du mois de mars dans son bureau. Elle est avocate.  Connaissant si bien ses « droits », les procédures du divorce n’ont pas pris plus d’un mois. Retournée vivre avec ses parents, notre avocate estime avoir de la chance.

 « Ma famille ne m’a jamais accablée. Bien au contraire, c’est grâce à elle que je continue à vivre normalement tout en essayant à rayer ces deux ans de mes souvenirs de femme », a-t-elle ajouté. Refaire sa vie avec un autre homme ? «Pas question. Ce serait assurément touchant de le dire mais  aucun des hommes ne m’inspire plus confiance », a-t-elle ajouté sans pour autant « condamner»  le mépris affiché envers elle par bon nombre de personnes au courant de son histoire.

 « Je suis souvent mal vue. Les gens continuent de porter encore des jugements négatifs à mon égard, sans même se poser des questions quant à mon cas. Je ne me suis apitoyée sur mon sort mais les mentalités doivent changer », a-t-elle insisté.

Un malheur  au nom de code de la famille…

En Algérie, les lois civiles relatives au couple et à la famille sont régies par un code de la famille établi le 9 juin 1984 sous la présidence de Chadli Benjedid. Ce code qui contient des dispositions relatives aux personnes, au mariage, au divorce et à l’autorité parentale, légalise l’infériorité de la femme, la maintenant sous tutelle à vie.

Le code de la famille fait des femmes d’éternelles mineures : à leur naissance elles sont sous l’autorité paternelle, et une fois mariées, elles passent sous l’autorité de leur mari.

Avant les amendements de 2004, en cas de divorce, les biens du couple, y compris le domicile conjugal, revenaient à l’homme de façon exclusive. En ce qui concerne la tutelle légale des enfants, seul le père la possède.

En 2004 donc, après  plus de vingt ans que les fidèles du progrès et de l’amélioration du statut de la femme algérienne attendaient une réforme du Code de la famille, faute de son abrogation, l’Algérie adoptait enfin une série d’amendements à ce code censés mettre ainsi fin aux principales discriminations dont les femmes sont victimes. Cependant, le satisfecit n’est guère à l’ordre du jour.

Des spécialistes de la question des droits de la femme en Algérie ont à chaque fois affiché leur mécontentement quant à «  ces amendements insuffisants « car à leurs affirmations, «le pouvoir algérien s’est laissé influencer par les islamistes».

D’autre part, selon les associations algériennes de défense des droits des femmes, une seule mesure est un réel progrès : En cas de divorce, l’époux est désormais tenu d’assurer un logement décent à la mère qui a la garde des enfants, ou à défaut, de payer son loyer. Et ce contrairement au passé où l’ex-mari pouvait mettre à la porte femme et enfant(s), même si l’épouse répudiée n’avait aucune source de revenus et que les enfants du ménage étaient encore financièrement dépendants de leurs parents.

Pour le reste soulignent ces associations, il faudrait certainement attendre une vingtaine d’années encore.

Y.O

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