Au lendemain d’un vendredi du « Hirak interdit » : Ambiance électorale à travers les rues et bureaux de vote de la capitale

Aujourd’hui, c’est le jour J, jour test pour les partisans des élections législatives. Les bouchées doubles ont été mises pour la réussite de ce scrutin dont l’unique enjeu est celui du taux de participation.

Virée au centre d’Alger le jour d’un scrutin pas comme les précédents.
Des fourgons des services de sécurité stationnés comme à l’accoutumée aux coins stratégiques et autour des centres de vote.

Une ambiance des plus monotones. Les citoyens semblaient complètement désintéressés, vaquant à leurs occupations quotidiennes en ce samedi, jour de weekend. En particulier à Alger. Nombre d’entre eux ont préféré une grâce matinée.

Dans les rues presque vides rien ne subsiste de la campagne électorale pour le scrutin. Indifférence totale. Rien n’indique qu’on est en ce jour particulier où l’on s’apprête à élire les futurs législateurs qui siégeront au parlement.

Quelques citoyens sirotant un café à proximité du marché Clausel, en pleine discussion sur le sujet des élections justement. « Je n’ai voté qu’une seule fois, c’etait lors des présidentielles de 1995, lors de la décennie du terrorisme. Le pouvoir a tracé une feuille de route dont le dernier virage sera la tenue des élections locales », explique l’un d’entre eux, d’un certain âge, une boucle grisonnante bien taillée, à ses vis-à-vis. « Depuis, je ne crois plus au vote », ajoute-t-il.
L’un d’entre eux s’interroge : Pourquoi tous les partis de l’opposition traditionnelle ont boycotté le scrutin ? « Justement, c’est là la grande question. Une preuve que l’on ne s’en sortira pas avec ces élections où les candidats, même ceux qui se présentent sous une chapelle partisane, qui n’ont pas de culture politique, ni de programme », lui rétorque l’homme à la boucle grisonnante.

Un peu plus loin, nous rejoignons la grande poste par la place Audin. Il est 10H. Même Topo. Ambiance morne et circulation très fluide.

10h30 : A l’intérieur d’un collège, centre de vote, du coté de la Casbah. (14 bureaux, 3199 inscrits) ; l’ambiance est monotone, sans vagues.

A l’intérieur de la cour du collège, seul le premier secrétaire du parti Jil El Jadid, Amokrane Lakhdar, enfant d’Alger, et également candidat livre ses impressions du matin à deux consoeurs.
« La matinée il n y a que les personnes âgées qui se rendent à l’urne », dit-t-il en prédisant un taux de participation de 15% à Alger et 40 à 45% à l’échelle nationale.

« A travers Jil El Jadid, je reviens à la politique, et avec l’espoir de contribuer à la construction d’une Algérie moderne et démocratique à travers des instances librement élues par le peuple », nous dit-il, médecin à l’EPSP de Bab El Oued, et ex- militant du front des forces socialistes de feu Hocine Aît-Ahmed qu’il a quitté vers la fin des années 90.
« Aujourd’hui nous avons l’opportunité politique de changer les choses vers le bon sens. Il est clair, c’est-là le début du changement», ajoute-t-il avec assurance.

Nous passons dans quelques bureaux de vote de manière aléatoire. Seuls les fonctionnaires papotent entre eux. Visiblement certains d’entre eux s’ennuient. Retour au bureau du chef du centre. «autour de 9h , on a enregistré 10 votants. C’est connu à Alger, on vote plutôt le soir, à partir de 15h », tente d’expliquer le chef du centre. « On a enregistré 44 votants à 11h, le taux montera progressivement dès 16h. C’est la tradition à Alger », enchaine son adjoint.

….Le vide sidéral laissé par l’opposition.

Le candidat du parti Jil El Jadid déplore le vide sidéral qu’ont laissé les traditionnels partis de l’opposition. « Ils ont leur raisons. Nous respectons leurs positions », dit-il.
Evaluant le contexte dont les élections se déroulent, il tente une explication du constat alarmant qui a vu discréditer l’action politique et même l’acte du vote « l’héritage des 20 dernières années passées avec Bouteflika, il y a eu rupture de confiance entre le citoyen et les gouvernants et même avec la classe politique ».
« En réalité aujourd’hui, il est important pour nous de participer à la réhabilitation de l’action politique et de contribuer à la construction d’un nouveau régime avec l’entité démocratique que représente le parti Jil El Jadid. », Déplorant une autre fois l’absence des partis de l’opposition.

Plusieurs citoyens ont déploré l’absence d’une réelle campagne électorale et dénoncent le fait que les partis politiques de l’opposition ne soient pas de la partie. « On est frustré par le manque sidéral de débat politique, d’échanges d’idées. Ce n’est plus comme avant », lâche un citoyen la cinquantaine bien consommée. Et d’ajouter : «Avant, il y avait une atmosphère politique. Maintenant, les partis politiques ne sont pas là. Ils ont manqué au décor de campagne ».

….Le cœur n’y est pas !

« On attend les citoyens. Ils sont les bienvenus », nous dira une dame responsable d’un autre bureau de vote. Les tenants de plusieurs bureaux se sont retrouvés seuls face à l’urne vide, sans aucun bulletin à l’intérieur. Rencontrée à la sortie du centre, habituée à prendre part aux opérations de vote, une dame qui ne s’est pas empressée de voter nous dira : « Il me semble que les gens sont usés, laminés par tant de tromperie par le passé que la confiance s’est évaporée entre les gouvernants et le citoyen ».

Une autre femme âgée avoue qu’elle est venue voter sans trop de conviction. « Je voterai au cas où ils nous donneraient un toit, enfin s’ils tiennent compte de leurs promesses. Mon fils est dans un besoin pressant d’avoir un logement », nous di-t-elle d’un air crédule.

« Tellement la confiance est perdue, ils promettent monts et merveilles pour que les gens votent. Celui qui part laisse la place à son fils », nous dit Mme Ali Yahya, chef de bureau, d’un autre centre de vote. « Le changement est un rêve que l’on se permet tout de même. On espère qu’il se réalise avec ces quelques cadres universitaires », ajoute-t-elle, tout en précisant que « ce n’est pas le fait qu’ils soient bardés de diplômes qui serait un gage qu’ils feront mieux que leurs ainés ». « En politique, il faut une réelle volonté de faire, de la conviction », conclue-t-elle.

Près de 12h : Ecole Tah Hocine filles : 3556 inscrits (14 bureaux) : 9h 32 votants, 10h 35 votants et 59 votants à 11h. 12H 65 votants. La majorité des bureaux n’ont pas enregistré plus de 5 à 6 votants.

« Seuls quelques bureaux ont connu 6 à 8 votants. Un bureau sort du lot avec 16 votants », nous dira une dame chef d’un bureau de vote, habituée des élections.
« C’est le calme plat ce matin, en attendant l’après midi. La seule différence qu’il y a par rapport aux précédentes élections, c’est l’absence cette fois de surveillants. Un seul est venu curieusement ce matin », nous dit-telle.

Vers 13h 30, un jeune distribue de petits flyers à l’effigie de Hadjabi Hadjer, candidate du parti « la voix du peuple », avec la ferme conviction qu’elle est « la candidate idoine » pour amorcer le changement : « Elle est bien capable de mener la tâche d’un parlementaire, à savoir porter la voix du peuple au parlement », dit-il.

A.Ben ALI

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